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Lettre de Kasuku  N° 33

 

La Lune, notre voisine

A l'exception de Vénus et Mercure, toutes les planètes possèdent des satellites. Jupiter en possède 16, Saturne 17, Uranus 15 et Neptune 10. Ces satellites sont toujours extrêmement petits en regard des dimensions de leur planète mère.

La Lune occupe une place à part dans le cortège des satellites. Distante en moyenne de 384'000 km, sa masse et son volume, relativement à ceux de la Terre (1/81e et 1/50e), en font un satellite particulier. De plus, le diamètre de la Terre n'est que quatre fois supérieur à celui de la Lune. Il serait donc plus juste de dire que l'ensemble Terre-Lune constitue une planète double.

La Lune tourne sur elle-même avec la même période que sa rotation autour de la Terre. Elle présente donc toujours la même face au regard des Terriens.  Les mesures géophysiques effectuées par les modules qui se sont posés sur notre voisine révèlent une structure interne assez semblable à celle de la Terre. Bien que cette structure ne paraisse pas homogène, elle possède un petit noyau central moins dense que celui de la Terre entouré d’un manteau rocheux, lui-même recouvert d’une croûte superficielle d’une trentaine de kilomètres d’épaisseur. Cette structure résulte du refroidissement et de la différenciation par gravité d’un magma originel en fusion. Il semble toutefois que la croûte soit plus épaisse sur sa face cachée, ce qui pourrait expliquer son mouvement synchrone. Son refroidissement plus avancé que celui de la Terre fait qu’aujourd’hui la Lune est géologiquement inactive.

 

Le système Terre-Lune, un haltère asymétrique

On affirme généralement que la Lune tourne autour de la Terre. Ce n'est pas vraiment exact et il serait plus correct de préciser que l'ensemble Terre-Lune, tel un haltère asymétrique, tourne autour du centre de gravité commun situé sur l'axe qui relie les deux astres, à 4'667 km du centre de la Terre.

La Lune est responsable des marées

Chacun sait que l'attraction de la Lune sur les océans provoque un gonflement du niveau des eaux - la marée - lors du passage de notre satellite au zénith. Mais ce qu’on sait moins - les manuels scolaires n’en parlent généralement pas - c’est qu’il y a aussi une marée haute sur la face de la Terre opposée à la Lune. Cette autre marée est provoquée par la force centrifuge occasionnée par la rotation asymétrique de la Terre autour du centre de gravité de “l'haltère” Terre-Lune.

 

L'ensemble Terre-Lune, un haltère assymétrique. On distingue les deux bourrelets des marées.

Le phénomène des marées n'est pas restreint à la masse des océans mais il affecte aussi les continents: il y a en effet des marées terrestres, tout à fait analogues aux marées marines, qui soulèvent les continents d'une quarantaine de centimètres deux fois par jour.

Les marées, de gigantesques freins. 

Sur le dessin précédent, on voit les deux "bourrelets" que sont les marées, toujours orientés selon l'axe Terre-Lune, mais avec une légère avance. Celle-ci est due à l'entraînement de la masse des océans par la rotation de la Terre qui décale la déformation causée par l'attraction de la Lune vers l'avant. Ces deux bourrelets agissent comme d'immenses mâchoires de frein qui, à la longue, provoquent un ralentissement de la rotation de la Terre.

La Lune s'éloigne, la Terre ralentit !

L'énergie de freinage, ainsi perdue par notre planète, est transmise à la Lune, transférée à son mouvement orbital, l'éloignant petit à petit de nous. Cet éloignement augmente de 3 cm chaque année alors que le ralentissement de la rotation de la Terre entraîne une augmentation de la durée du jour d'environ 2 millièmes de seconde par siècle !  Cette valeur peut paraître faible mais, si on tient compte des quatre milliards et demi d'années d'existence de la Terre, ce ralentissement est loin d'être négligeable. On a pu démontrer en effet qu'à l'ère primaire la Terre tournait sur elle-même en 22 heures et que l'année comptait alors 400 jours !

Si on remonte dans le temps de quelques centaines de millions d’années, on est obligé d’admettre que la Lune était à une distance beaucoup plus proche de la Terre, peut-être à moins de 100'000 km.

Petite histoire "géologique" de la Lune

On doit les premières descriptions cartographiques de la Lune à Galilée qui, dès 1609, pointait sa lunette en direction de notre satellite. Très vite on a distingué deux sortes de formations :

  • des zones sombres, plates, grossièrement circulaires, improprement appelées maria ou mers,
  • des "continents", plus clairs, montagneux, occupant le reste de la surface.

Mers et continents sont criblés de cratères circulaires de toutes dimensions, dont les plus grands dépassent plusieurs centaines de km de diamètre. Ils sont dus aux nombreuses chutes de météorites.

 

Les “continents”

Caractérisés par une couleur claire, les continents recouvrent la moitié de la surface lunaire. Ils sont marqués par la juxtaposition et le recouvrement mutuel d'une multitude de cratères de toutes dimensions et de leurs "éjecta". Le sol lunaire, épais d'une dizaine de mètres, s'appelle "régolite". C'est une couche de poussière et de débris rocheux plus ou moins grossiers. Ce sont les débris d'impacts de météorites. Les roches rapportées sur terre sont toutes des roches éruptives, principalement des anorthosites*, plus rarement des basaltes. Toutes ces roches montrent une fracturation intense due aux innombrables impacts météoritiques et sont transformées en de véritables brèches. L'âge de la cristallisation des minéraux est compris entre -4.4 et -4.6 milliards d’années, alors que l'âge de la transformation en brèches s'étend de 4.6 à 3.8 milliards d’années.

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l'anorthosite est une roche  constituée principalement de feldspath calcique, l'anorthite, accompagnée en faible proportion de pyroxène, d'olivine ou d'amphibole. C'est une roche décorative fréquente des dalles funéraires remarquables par la labradorescence de l'anorthite. 

Les “mers”

Les "mers" sont les taches sombres qu'on peut apercevoir à l'oeil nu au cours des nuits de pleine Lune. Ce sont de vastes plaines peu cratérisées de forme grossièrement circulaire. Elles sont nombreuses sur la face visible de notre satellite et, curieusement, très rares sur sa face cachée. Ces "mers" recouvrent les "continents" en laissant émerger les parties les plus hautes, donnant l'impressions de caps, d'îles et de péninsules. Elles sont constituées de basalte. On pense que ce sont des météorites géantes qui ont percé le manteau et favorisé l’invasion du cratère par des basaltes en fusion.

Les roches lunaires

Elles sont toutes de nature éruptive, à l'exception des brèches de la surface qui ont été formées par les impacts des météorites. Leur composition est comparable à celle des roches éruptives terrestres. Toutefois, globalement, elles contiennent plus de calcium, d'aluminium et de titane, un  peu moins de sodium et de potassium. Elles sont de nature anorthositique. La composition des roches qui constituent les mers est différente de celles des continents : ce sont des basaltes qui ont envahi les parties basses d'anciens bassins et cratères géants. L'âge de ces basaltes est compris entre - 3.9 milliards d’années pour les plus anciens et -3.2 milliards d’années pour les plus récents.

 Les cratères 

Ils représentent la principale caractéristique du relief lunaire. Ils sont l'aboutissement d'un bombardement intense de météorites de toutes tailles qui s'est produit dès le début de l'histoire de la Lune. Ils sont toujours entourés d'une couronne de débris, les "éjecta".

 Les dimensions des cratères varient de quelques mètres pour les plus petits à plusieurs centaines de km pour les plus vastes. On nomme souvent "bassins" ceux dont le diamètre dépasse 200 km. L'étude des âges relatifs des cratères suivant leur taille, selon le principe qu'un cratère qui se superpose à un autre est plus jeune que celui-ci, permet de reconstituer l'intensité du bombardement météoritique dans le temps.

 

L'origine de la Lune

L'origine de la Lune est toujours une énigme pour les savants. Plusieurs hypothèses ont été échafaudées :

  • La Lune serait une partie du manteau terrestre qui se serait séparé de la Terre très tôt dans l'histoire commune des deux astres.
  • La Lune se serait formée ailleurs dans le système solaire et aurait été capturée lors de son passage à proximité de la Terre.
  • Les deux astres se seraient formés simultanément à proximité l'un de l'autre, à partir du même nuage de poussière et de gaz.
  • La Lune se serait formée à partir du matériel éjecté à la suite d'une collision entre la Terre et un autre astre.

Les deux premières ont été abandonnées car elles ne parviennent pas à expliquer la dynamique des mouvements des deux astres ni les analogies et différences dans leur composition pétrographique.

L'hypothèse de la formation simultanée des deux astres à proximité l'un de l'autre a eu longtemps la faveur des savants. Toutefois elle n'explique ni pourquoi la Lune n'a pas de noyau métallique, ni le moment cinétique actuel du système. 

L'hypothèse de l'impact connaît actuellement un regain de faveur et des simulation mathématiques semblent indiquer que ce modèle permet d'expliquer tous les paramètres physiques et dynamiques caractéristiques des deux astres.

Très tôt dans l’histoire du système solaire, une collision se serait produite entre la Terre et un autre objet de grande taille. Cette collision aurait entraîné l'éjection d'une énorme quantité de matière qui se serait agglomérée dans le voisinage de la Terre pour donner naissance à la Lune.

Cette théorie permet d'expliquer toutes les différences et les similarités entre la Terre et la Lune. La matière éjectée provenait principalement du manteau, plus pauvre en fer, ce qui explique que la Lune contient une faible proportion de cet élément. Cette hypothèse explique mieux pourquoi la Terre est la seule planète interne du système solaire à posséder un satellite de si grande taille.